Très peu de pèlerins arrivés à Compostelle ou à Finisterre décident de repartir en sens inverse, directement ou l’année suivante. Et pourtant, ce chemin du retour, vers chez soi, vers le soleil levant, fut pour moi le complément indispensable du voyage aller.
Le chemin « à l’envers »
Je n’aime pas l’expression « faire le chemin« . Les mots « à l’envers » me semblent tout aussi inappropriés. Disons plutôt « le chemin du retour ».
Certes, depuis le renouveau du pèlerinage au XXe siècle, les pèlerins ont tous les moyens de transport à leur disposition pour le retour. Ce n’était évidemment pas le cas pour les anciens, qui partaient et revenaient à pied. D’ailleurs, les nombreux calvaires sur le camino ont deux faces : le Christ à l’aller, la Vierge Marie au retour…
Pourquoi le chemin du retour ?
Selon moi, l’expérience du chemin ne peut être complète que si l’on fait l’aller et le retour.
L’aller permet d’aller vers soi, le retour est plus tourné vers les autres.
L’aller vers le soleil couchant permet de mourir à son ancienne vie, à ses défauts, à ses problèmes,… Le retour vers le soleil levant permet de s’ouvrir à une nouvelle vie, d’élaborer des projets, de recommencer à zéro parfois…
Le retour a pour but final la maison, le foyer, c’est donc sur le chemin du retour que l’on peut je mieux penser à ce que l’on va faire de tout ce que l’on a reçu à l’aller, comment rester un authentique pèlerin dans sa vie quotidienne.
Est-ce que le retour est fléché ?
Le retour du Camino Francès est très peu emprunté, à part le tronçon entre Finisterre / Muxia et Santiago. Seul ce tronçon est fléché, ensuite il faut se débrouiller.
Sur le Camino Francés, aucun problème pour deviner le chemin du retour, surtout si on l’a parcouru à l’aller.
Soit on voir arriver les pèlerins en sens inverse, soit on regarde l’orientation des flèches de l’aller. La seule difficulté est quand le chemin se sépare en 2 : il faut alors deviner laquelle des branches du « Y » est la bonne.
Quelques indices pour reconnaître le chemin des pèlerins : l’herbe piétinée au bord de la route, l’absence d’herbe au milieu d’un chemin de terre, les nombreux papiers qui jonchent les côtés (hélas…).
Il existe bien quelques fléchages comme les autocollants « Jerusalem Way » ou les flèches, tantôt bleues, tantôt jaunes avec la queue en colimaçon, mais on les trouve surtout dans les lignes droites et pas quand on en a besoin. De plus, à Fonfria, une de ces flèches m’a carrément envoyée dans un mauvais chemin, que j’ai suivi en confiance pendant 2 km avant de réaliser que je suivais la vallée au lieu de monter vers O Cebreiro.
Pour le Chemin du Puy, en France, pas de souci car les GR sont signalés dans les deux sens.
Pour tous les autres chemins, il est indispensable de se munir de bonnes cartes IGN (ou GPS ?) avec le tracé précis si on ne veut pas passer son temps à faire demi-tour.
La credencial du « Kamino Retorno »
Il existe une credenciale spéciale pour le retour de Santiago. On peut se la procurer à Fisterra. En plus d’être très jolie, elle a la particularité de se remplir comme un jeu de l’oie.
La solitude sur le chemin du retour
J’entends beaucoup de pèlerins se plaindre qu’il y a trop de monde sur le chemin. Eh bien, faites le retour ! Vous serez probablement seul, car il y a en moyenne un pèlerin par jour qui quitte Compostelle vers l’est.
Bien entendu, on n’a pas le plaisir de voir des têtes familières, le soir ou à l’arrivée. Mais cela est compensé par la joie de retrouver des personnes « fixes » qui vous ont aidé ou hébergé à l’aller.
Les contacts sont nombreux avec les pèlerins en sens inverse, car la démarche étonne. On sert aussi de « radio camino » (untel est devant, telle auberge est super, telle variante est à ne pas manquer…). Je dirais même qu’un pèlerin sur le retour recevra plus facilement les confidences de ceux qui vont à Saint Jacques, car on sait que l’on ne se reverra plus.
Plus cool le retour
Pas de course à l’albergue dans le sens du retour. On n’a personne dans le dos qui vous met la pression, personne devant qui vous attend au bar. On se laisse aller à trouver son propre rythme.
On connaît les passages difficiles, les bons endroits de baignade, les bivouacs mille étoiles. Le chemin est familier, rassurant. Attention toutefois à ne pas sombrer dans la routine et à se laisser surprendre par de nouvelles étapes, de nouvelles variantes…
Que m’a apporté le chemin du retour ?
Le deuil (joyeux) du chemin, en repassant en chaque lieu pour lui dire « au revoir » avant de rentrer chez moi, tout en ayant parfois un regard plus critique qu’à l’aller sur les dérives commerciales, la foule, le bruit…
Des projets pour ma vie future (et pour d’autres chemins peut-être)
Des rencontres plus vraies, car éphémères (avec les gens que l’on croise) ou précieuses (avec les rares pèlerins qui vont dans le même sens)
Une spiritualité plus profonde, une foi renforcée, notamment grâce à des rencontres qui ont marqué mon cheminement.
Repartir vers Saint Jacques ou rentrer ?
La réponse en vidéo…
Bonjour,
J’ai rencontré, en octobre 2015, Alban. Il vivait l’expérience de l’aller-retour, mais depuis Istanbul! Très belle rencontre, avec un témoignage très proche du vôtre.
Malheureusement, je n’ai pas pris ses coordonnées.
J’aimerai tellement avoir de ses nouvelles aujourd’hui!
Voilà! C’est un remerciement pour ce témoignage, en même temps qu’un appel!
Bon cheminement!
Marion
Bonsoir Sylvie
Je comprends quand vous dîtes faire le retour, j’aime ces chemins pour des raisons personnelles, ensuite c’est une question de temps de faire l’aller et le retour.
Je désirais faire le chemin du nord , mais mon amie ne marche pas trop vite mais veux bien faire le chemin en une seule fois.
Comme je l’ ai est tous fait, je pensais justement faire le retour du camino francés fais en 2003, pour cette solitude…
C’est la ou je me questionne,quand vous dîtes » Pas de course à l’albergue » dans le sens du retour les randonneurs sont la en sens inverse certes, mais dans les gîtes également et ce chemin est vraiment surpeuplé.
le via de la plata est trop long pour mon amie, et le Portugal trop court pour moi.Dilem. Monique
Il y a toujours de la place dans les albergues ! Ce qui est pénible, c’est d’être dans le même sens que ceux « qui courent ». Dans l’autre sens, on arrive relax, bien après tout le monde, et on prend les dernières places 🙂
Le retour depuis Santiago :
Bonjour Sylvie,
Depuis le temps que je te lis je prends enfin la plume.
Je suis allée trois fois à Santiago, la dernière fois à l’automne 2015 et j’avais bien prévu de revenir à pieds car ce retour à pieds me manquait. Passée par le Somport puis le camino Sanabres à l’aller j’avais prévu de revenir par le camino frances vu la saison (novembre) et le nombre d’albergues fermées.
Je n’avais pas vraiment de cartes(sauf la Michelin du camino frances) mais j’avais une boussole (et elle m’a parfois bien aidée) et comme tout le monde dans ce cas là j’ai développé des qualités de détectives car en novembre il ne faut pas trop compter sur les pèlerins arrivant en sens inverse (même si parfois ça arrive). Je confirme le fait qu’en montant au Cebreiro il y a des flèches inversées qui t’amènent n’importe où mais pas au Cebreiro, que les flèches bleues sont rarement placées là où on en aurait vraiment besoin, les auto-collants « Jérusalem » sont aussi utiles. Le plus dur finalement ce sont les petites villes où il est si facile de se perdre. Je parle assez bien espagnol et ça aide aussi. Je ne me suis perdue que deux ou trois fois par étapes, sans autre gravité que quelques kilomètres de plus. Je suis parfois arrivée à la fin de l’étape par la route plutôt que par le chemin car il est parfois difficile de le repérer quand il part très discrètement par un côté sans qu’on le voit. Il m’est même arrivé de le longer sur trois kilomètres en marchant au bord de la Nationale : il était à 100 mètres sur ma droite mais un canal nous séparait. Cela ne m’a pas empêchée de rentrer à bon port.
En arrivant chez moi j’ai eu enfin l’impression d’avoir terminé le pèlerinage, la preuve je n’ai pas eu l’envie de repartir tout de suite.
Un an après je recommence à regarder les différents chemins et à penser à mon prochain pèlerinage, peut-être en 2018 ou en 2019, par d’autres itinéraires.
Résumé N°1: la prochaine fois je m’achèterai un smart-phone pour pouvoir y stocker les cartes au 25000, je pense que ça peut aider surtout sur d’autres chemins que le camino frances.
Résumé N°2 : même sans smart-phone je le referai quand j’aurai le temps.
A bientôt.
Claudine
Oh merci de tout coeur Chère Claudine pour ce beau témoignage ! Prochain chemin vers Assise ???
Ça me fait très plaisir à chaque fois de t’écouter. Faire le chemin dans l’autre sens, c’est exactement l’idée qui m’est venue à l’esprit, ça me semble logique, et puis je pense que si on a parfois le besoin de partir, rentrer chez soi c’est toujours comme une sorte de pèlerinage également. On regarde les autres d’une autre façon, eux ne savent pas forcément que tu es parti et que tu rentres, tu es plus riche d’une certaine façon, tu as l’avantage sur ceux qui ne sont jamais parti.
Je dis ce qui me vient, je ne sais pas si je m’exprime clairement. Je n’ai pas fait de pèlerinage à proprement parler, mais comme beaucoup je suis parti un jour, ce n’est jamais facile, mais je ne regrette rien.
Bises
Hola les amigos, je compte faire le retour un de ces sur le Caminos de la Norte !
Quelqu’un l’a-t-il déjà fait ?
Merci et bon courage à vous !
Oui Fernand est revenu par le Norte. Contactez-moi sur Facebook et je vous mettrai en contact.
Bonjour Sylvie,
Je viens de découvrir ton site Radio Camino, mes félicitations pour cette belle initiative qui est un phare pour les pèlerins de Compostelle.
Cette année 2020, le 1er août exactement je partirai de Liège (wallonie) vers Compostelle, aller retour à pied. J’ai prévu 7 mois de route, en empruntant un chemin aller Liège- Le Puy-en-Velay-chemin français-Finisterre et retour par la voie du nord, bord de mer espagnol, puis remonter la France par Bordeau, Poitier, Paris….Belgique….
J’aimerai partager certains points avec toi par mail..
Merci big hugs
Pierre
Waouw, quel beau projet ! Avec plaisir pour échanger par mail, en attendant un prochain ‘pot du pèlerin » 🙂
Bonjour Sylvie,
Merci pour ta pétillante réponse, avec joie pour le partage par mail…. et le pot du pèlerin.
Cordialement
Pierre
J’ai beaucoup aimé votre commentaire sur le Chemin du retour.
Je devais prendre le retour le 17/03/20, mais avec ce qui se passe , j’ai remis à septembre ou octobre.
J’ai une question , vous parlez de la Crédencial du retour, comment l’obtenir et où à Fisterra.
Merci
Pour la crédenciale, le plus simple est de l’acheter au bureau des pèlerins à Compostelle (où vous passerez probablement si vous allez à Fisterra). J’avais une credenciale vers Rome mais toute credenciale est valable pour le retour 🙂
J’ai la même envie farouche du retour de saint-jacques , ce sera un peu beaucoup bordélique sans doute mais passionnant .
Pour l’an prochain , au moment de mon départ à la retraite .
Le camino del norte en 19 fut le plus beau moment de ma vie et ce sera donc par-là …
Amicalement , pierre
Vous dites à fisterra pour la crédentiale du kamino retorno ; où ?
Amicalement , pierre
Bonjour à toutes et à tous,
J’ajoute ce commentaire – qui est plutôt une demande de conseils-suggestions – à celui de Sylvie quant au chemin « à l’envers » et qui date un peu désormais.
C’est décidé ! Tout « jeune » retraité, je vais me lancer sur les chemins de Compostelle mais selon un format un peu particulier.
Mon projet est le suivant : la via Lemovicensis entre Vézelay et SJPDP, puis la via Podiensis en sens inverse entre SJPDP et Le Puy. Voilà ce qui me relie au commentaire sur le chemin « à l’envers ».
Départ prévu le 21 mars 2022 pour une durée de 3 mois et demi. Je ne suis pas pris par le temps et je souhaite marcher à mon rythme sans être lié à des étapes cadrées et des horaires trop restrictifs, selon un cadencement général de 3 jours de marche pour 1 jour de repos. Comme le dit un beau proverbe tibétain : « Le bœuf est lent, mais la terre est patiente ». Pour l’occasion, le bœuf ce sera moi !
Le contexte sanitaire actuel qui – sauf évolution majeure dans les prochains mois (ce dont je doute – va quelque peu modifier mon projet initial En effet, le non-vacciné que je suis (quelle horreur !), imagine aisément que l’accès – prévu de temps à autre dans mon projet pour « remise en condition optimale » – à la plupart des gîtes et autres accueils (hormis campings peut-être) me sera interdit.
Mais finalement ce n’est pas grave. S’il faut que je passe 100 nuits en hébergement de fortune au gré de mes trouvailles ou du bon vouloir des personnes rencontrées (hangar – grange – remise – abris divers) ou en bivouac traditionnel dont j’ai une grande habitude, que je pratique les ablutions d’opportunité et la lessive à divers points d’eau et la nourriture au camping-gaz n’est pas problématique pour moi.
Tout ceci m’obligera donc à partir avec ma « maison sur le dos » ou, pour être plus exact, avec ma maison sur chariot de randonnée (dans la durée, mes lombaires m’en seront gré…).
Je recherche donc tout témoignage utile et autre conseil :
– d’une part, sur les chariots de randonnée (notamment les chariots pouvant être mis à dos en cas de passages délicats)
– d’autre part, sur les périples en autonomie quasi complète. Autonomie ne signifiant bien sûr pas vie de « sauvage » mais permettant à n’en pas douter de belles rencontres…même si une partie de cette aventure se fera « à contre-sens ».
Merci par avance de vos informations, conseils et autres suggestions sur ces 2 points.
Autre questionnement quant à la (aux) crédenciale(s) dont je serai muni. Qui est « habilité » à l’oblitérer sur un parcours : les paroisses ? accueils religieux ? mairies ? n’importe quelle mairie sur le parcours ou à proximité immédiate ? gîtes privés ou associatifs (même si on n’y loge pas) ? offices du tourisme ? campings ? autres ?
Ce commentaire est un peu long et je vous prie de m’en excuser.
Dans l’attente de vos retours, vous tous qui avez une grande expérience du chemin.
Je vous en remercie par avance.
Et merci à Sylvie pour son très beau site, découvert il y a peu, et qui est une mine d’infos et de conseils très utiles.
Cordialement.
Jean-Paul (Carcassonne – Montpellier / 06/ 27 68 61 47)
Bonjour
j’ai apprécié votre présentation . Ayant déjà parcouru le chemin français, j’aimerais savoir à qui m’adresser pour avoir plus de détails sur le chemin du Nord, voulant effectuer le « retour » à partir de Santiago.
Merci d’avance pour votre aide.
Jean-Michel
Il est préférable de suivre le Chemin du Nord dans le sens vers Compostelle et le retour sur le Camino Frances, pas l’inverse. Vous risquez moins de vous tromper de chemin et ferez plus de rencontres.
Bonjour
L’avez-vous parcouru pour être aussi précise ?
Je comprends votre remarque, mais j’ai déjà parcouru le chemin de chez moi, Pont Sainte Maxence dans l’Oise par Vézelay, le Puy en Velay Burgos et Santiago. C’est le retour par la voie du Nord qui me semble le plus adapté. Merci encore pour votre conseil
Bonjour
Je pars fin août pour Lisbonne. Je souhaite parcourir ce chemin jusqu à St Jacques et je me questionne sur les hébergements jusqu à Porto. Je ne trouve que des témoignages qui datent d une dizaine d années alors je me demande s il y a maintenant plus de refuges ou s il nous faut encore compter sur les pompiers ou les hébergements privés , donc plus chers. Quelqu un pourrait il me renseigner à ce sujet?
Merci beaucoup